Nantes, Lundi 5 juin 2000
Gunar Letzbor, baroque star du violon
Chaude ambiance, lundi dernier, au musée des Beaux-Arts, pour accueillir
le feu sous la glace en la personne de Gunar Letzbor, personnage atypique
s'il en est de la musique baroque. II n'enlève pas sa chemise, mais
sous son smoking de scène bat un cur de rocker.
Ce violoniste autrichien, cul-minant à deux mètres, beau comme
une star, large comme vous plus moi, cheveux très longs tenus en
arrière, dirigeait ce lundi son ensemble Ars Antiqua Austria. Le
public du Printemps des arts, sur un petit nuage, découvrait, ou
retrou-vait, le charisme d'un interprète original et érudit,
une sensibilité au service de l'intelligence du passé et,
par-dessus tout, l'irrésistible élé-gance du jeu de
l'interprète. Le géant autrichien nous entraîne chez
les plus inattendus des compositeurs baroques, ceux qui nous ont laissé
des musiques d'une fabuleuse ardeur.
La prodigieuse maîtrise de la virtuosité du géant autrichien,
liée à une grande douceur de toucher, donne un tonus et une
vie électrique aux pièces de Weichlem (1652-1706) ou de Muffat
(1653-1704). Letzbor habite son violon comme une patrie Et son plaisir de
jouer est forcément communicatif.On a tôt fait de battre la
mesure en tendant l'oreille aux danses villageoises du "Capriccîo
Strava-gante " de Carlo Farina, tambou-rinées par les archets
des musiciens sur les caisses des violons ou sur les cordes de la contrebasse.
La danse règne en maîtresse sur la musique et Letzbor sait
la faire giguer avec un soin et un souffle étourdissants. Mais de
toutes ces partitions formidables, on retiendra peut-être la sonate
n°3 d'Heinrich Ignaz Franz von Biber, spectaculaire compositeur autrichien,
fondateur du violon polyphonique et face auquelLetzbor offre toute sa fantaisie
dans un jeu survolté et puissant. Et l'excellent flûtiste Michael
Oman s'est offert quelques belles salves d'applaudissements pour sa vigou-reuse
interprétation du concerto en do majeur pour piccolo flûte
à bec de Vivaldi
Jean-Luc QUÉAU.
A découvrir au disque, les So-nates du Rosaire de Biber, par Gunar Letzbor. Une musique in-descriptible enregistrée chez l'édi-teur nantais Arcana.