RÉPERTOIRE N°122 MARS 1999
Georg MUFFAT (1653-1704)
FLORILEGIUM PRIMUM (1695).
Ars Antiqua Austria, dir. Gunar Letzbor.
Symphonia SY98160 (Abeille Musique).
1998
Bien avant les Nations et les Goûts Réunis de François
Couperin, Georg Muffat avait rêvé d'unir les différents
styles nationaux instrumentaux et de dépasser les querelles esthétiques
de son époque. Ayant passé plusieurs années à Paris
dans sa jeunesse et plusieurs mois à Rome autour de 1680, il avait cherché à faire
partager ses expériences à ses compatriotes. Si l'Harmonico Tributo
(1682), hommage à Corelli et au genre du Concerto Grosso, avait reçu
tes faveurs de l'archevêque de Salzbourg, il n'en fut pas de même
pour les pièces dans le style français que Muffat mit très
longtemps à pouvoir publier. Aujourd'hui encore, ce n'est pas un hasard
si la discographie met surtout à l'honneur l'Harmonico Tributo : Le
Fioriiegium Primum (1695) et le Fioriiegium Secundum (1698), les deux recueils
d'inspiration française, posent en effet de nombreux problèmes
d'interprétation. Muffat avait d'ailleurs pris la peine de donner dans
les préfaces des deux ouvrages toute une série de conseils aux
violonistes allemands de l'époque, pour les initier aux conventions
rigoureuses mises en place par Lully. Ces mini traités constituent un
témoignage irremplaçable sur les techniques de jeu de l'époque.
Ars Antiqua Austria renouvelle l'expérience trois siècles plus
tard. Comme il vient de ie prouver avec l'excellent disque consacré aux
musiques de Cour de Biber et Schmelzer (N° 121,10 de Répertoire),
l'ensemble autri-chien est parfaitement à l'aise dans le répertoire
baroque allemand. Gunar Letzbor et ses collègues se sont donc retrouvés
comme les musi-ciens de l'époque dans la situation délicate d'aborder
un style non familier. Ils ont scrupuleusement suivi les indi-cations des préfaces
pour travailler les pièces : absence de fantaisie pour les tempi, clairement
exprimés par les signes de mesure, respect absolu des appuis des danses,
coups d'archet réguliers et systématiques... Autant de contraintes
qui remettent complètement en question le phrasé et le rendu
des pièces.
Le résultat est surprenant : si les référence au style
français sont constantes, on est face à un univers musical étrange,
tenant à la fois de Lully, de Corelli et du style germanique. Une synthèse
cosmopolite pour laquelle Muffat milita et qu'il réalisa en solitaire.
Le travail effectué est impressionnant : il suffit de comparer les Balletti
du disque Biber/Schmelzer et celui du Fasciculus II pour voir à quel
point les interprètes ont réfréné leurs penchants
natu-rels pour la fougue et l'empha-se. Point de spectaculaire ici, mais une
recherche permanen-te de l'élégance et de la mesu-re, jusque
dans les dissonan-ces des ouvertures, presque précautionneuses, à peine
osées.
On est aussi étonné que les musiciens ont dû l'être
- ceux du XVIle siècle compris ! Les dissonances désorientent,
les ornements fusent à tous les instruments, sans cohérence d'abord,
puis tout se recon-stitue au fil des écoutes. L'in-tégration
de la flûte est parti-culièrement heureuse et per-met d'obtenir
des couleurs aussi variées que subtiles (Gigue H du Fascicuius II, Rondeau
du III ou Canaries du IV). Les effets ne sont jamais déplacés,
comme les pizzicati de la Gavotte (II), ou l'extra-ordinaire Allemande jouée
au violon solo avec la basse et dans laquelle les voix intermédiaires
n'interviennent qu'aux reprises, créant un écrin harmonique qui
n'en met la mélodie que plus en valeur (V, plage 29).
Un disque magnifique donc, étrange et passionnant, qui permet de découvrir
un Muffat très différent de celui de l'HarmonicoTributo : confiden-tiel, énigmatique,
et servi avec humilité par un ensemble qui n'a pas hésité à prendre
de véritable risques en remettant en question ses méthodes de
travail. La fragilité du résultat fait son intérêt
: on est peut-être ici aussi loin du résultat voulu par Muffat
que l'on pouvait t'être il y a trois siècle du véritable
style français.
La voie est en tout cas ouverte, et l'on ne peut qu'espérer pour bientôt
l'enregistrement du second recueil !
Pascal Le Guern
NOUVEAUTÉ 1re €€€€ 74’
Stéréo DDD_ _ ___
Prise de son d'une fidélité optimale__ ____ Notice YYYY(notice
courte et concise, dans laquelle Letzbor expose son projet avec clarté et
franchise)
SCHERZO 107 ‘99
MUFFAT: Florílegium primum.
Ars Antiqua Austria. Director: Gunar Letzbor. SYMPHONIA SY 98160. DDD. 74’03".
Grabación: VII/1998. Productores: Roberto Meo, Sigrid Lee. Ingeniero:
Roberto Meo.
Distribuidor: Diverdi. PN
Después de dedicarse a estudiar música durante su juventud en
Alsacia y París, y de recibir los más sabios consejos del todo-poderoso
Lully, el austríaco Georg Muffat se embriagó de ios sonidos de
la música de danza y del refinado gusto francés, lo que le supuso
más de un problema en su Austria natal donde el predominio de los modelos
musicales italianos era evidente. No obstante Muffat fue capaz de introducir
poco a poco el gusto francés en los círculos musicales vieneses
y sobre todo supo enseñar a los músicos austriacos todo lo relativo
a la interpretación de la música de danza. Así lo señala
expresamente en la introducción de sus recopilaciones de suites como
la que ocupa la totalidad de este compacto, Florilegium primum. Muffat es-cribe
un verdadero tratado de cómo deben interpretarse las danzas francesas,
da indicaciones concretas sobre los movimientos del arco que considera más
propios para dotar de una cierta uniformidad a la inter-pretación de
los más variados ritmos de danza, y otorga un gran valor a las notas
ornamentales; "...una forma de habituarse fácilmente a expresar
más exactamente dicho ballet de la manera verdadera y más graciosa...".
Y sin duda los músicos de Ars Antiqua Austria han recogido el guante.
De la mano de Gunar Letzbor han descubierto la clave que propuso Muffat en
el siglo XVII para desentrañar toda la belleza de estas músicas
bailables, que es lo mismo que descubrir toda la sutileza de la música
francesa de la época. Una forma diferente de sentir el arco sobre las
cuerdas, y a la vez, la música en el movimiento.
M.S.
EL CULTURAL 171 99
GEORG MUFFAT: "
Flonlegium Primum".
Ars Antiqua Austria. Gunar Letzbor.
Symphonia SY 98160
Interesante este nuevo disco de Symphonia en el que se nos ofrece música
del austríaco Georg Muffat. Música muy, muy a la francesa,
pues se trata de su primer libro de suites, llamado "Florilegium Primum" y
escrito como reacción a la gran invasión de músicos
italianos que imponían su estilo en Austria.
La música es muy hermosa y encuentra en la interpretación de
Ars Antiqua Austria a un fiel transmisor. Dirigidos por Gunar Letzbor, estos
músicos nos brindan unas bellísimas danzas con toda la nitidez
exigible: desde la solemnidad, el brillo y la riqueza que confieren las ornamentaciones
hasta las numerosas hemiolias que alteran el ritmo -impensable una música
a la francesa sin cualquiera de ellas-; desde los bailes mas rítmicos
hasta los mas tranquilos, todo es claridad, segundad y armonía.
Un disco muy hermoso, por dentro y por fuera con unas interesantes, aunque
breves notas firmadas por el propio director del conjunto, Gunar Letzbor.
La toma de sonido es asimismo excelente.
Ana MATEO